Région Auvergne-Rhône-Alpes : en 2023, le niveau de la sûreté nucléaire et de la radioprotection reste globalement satisfaisant

Publié le 19/09/2024 à 10:00

Communiqué de presse

A l’occasion de la parution du Rapport de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023, la division territoriale de Lyon de l’ASN présente les conclusions des actions de contrôle qu’elle a menées tout au long de l’année 2023 en région Auvergne-Rhône-Alpes.

L’activité de contrôle de l’ASN en 2023 en région Auvergne-Rhône-Alpes

 

 309 inspections

  • 111 inspections dans les centrales nucléaires du Bugey, de Saint-Alban, de Cruas-Meysse et du Tricastin ;
  • 96 inspections dans les usines et les installations en démantèlement ;
  • 90 inspections dans le domaine du nucléaire de proximité ;
  • 12 dans le domaine du transport de substances radioactives.

22 journées d’inspection du travail dans les quatre centrales nucléaires et sur le site de Creys-Malville.

26 événements significatifs

  • 24 événements significatifs de niveau 1 sur l’échelle INES ont été déclarés à l’ASN dont 21 dans les installations nucléaires de base, 1 dans le transport de substances radioactives et 2 dans le nucléaire de proximité ;
  • 2 événements classés au niveau 2 de l’échelle l’ASN-SFRO (échelle spécifique pour les événements de radioprotection affectant les patients dans le cadre d’une procédure de radiothérapie).

Domaine médical

L’ASN constate en 2023 le maintien d’un bon niveau de radioprotection, avec toutefois des fragilités dans certains domaines et des « signaux faibles » d’une dégradation. Dans un contexte général de manque de moyens, parfois financiers mais surtout humains, des organisations se mettent en place (appel à des prestataires, travail multisite, télé radiologie, mutualisation de moyens ou de personnels…) qui peuvent présenter des risques du fait de glissement de tâches qu’elles sont susceptibles d’engendrer de dilution des responsabilités ou de moindre appropriation des enjeux de radioprotection.

En radiothérapie et curiethérapie, les inspections réalisées en 2023 montrent une situation satisfaisante tant en radioprotection des patients que des travailleurs. Si les fondamentaux de la sécurité sont en place, les démarches de retour d’expérience ont tendance à s’essouffler et il est

nécessaire de leur redonner du sens afin de maintenir l’intérêt des professionnels et de garder une démarche collective. La répétition d’erreurs de cibles (notamment de latéralité) rappelle la nécessité d’évaluer régulièrement les barrières mises en place. En Auvergne-Rhône-Alpes, les deux événements significatifs classés au niveau 2 de l’échelle ASN-SFRO en 2023 étaient liés à une erreur de latéralité.

Concernant les pratiques interventionnelles radioguidées, les inspections réalisées en 2023 mettent en évidence que des non-conformités réglementaires persistent au fil des années en radioprotection des travailleurs. Elles concernent notamment le manque de formation des professionnels à la radioprotection, la lenteur de mise en conformité des installations et la coordination des mesures de prévention avec les entreprises extérieures.

Domaine industriel

L’ASN constate que les entreprises ont, dans leur grande majorité, maintenu la rigueur nécessaire pour respecter les obligations réglementaires.

En matière de radiographie industrielle, l’ASN estime que les donneurs d’ordre devraient privilégier, lorsque c’est possible, les prestations de radiographie industrielle dans des casemates et non sur chantier. En effet, les conditions de préparation, de coordination et de réalisation des tirs radiographiques, même si elles sont globalement bien maîtrisées, font encore l’objet de trop nombreux constats d’écarts.

Le contrôle des centrales nucléaires de production d’électricité exploitées par EDF (Bugey, Saint-Alban, Cruas-Meysse et Tricastin)

Centrale nucléaire du Bugey

La centrale nucléaire du Bugey, exploitée par EDF dans la commune de Saint‑Vulbas, dans le département de l’Ain, à 35 km à l’est de Lyon, est constituée de quatre réacteurs à eau sous pression d’une puissance de 900 MWe chacun, mis en service en 1978 et 1979. Les réacteurs 2 et 3 constituent l’INB 78, les réacteurs 4 et 5 constituent l’INB 89.

L’ASN considère que les performances de la centrale du Bugey rejoignent l’appréciation générale que porte l’ASN sur les centrales nucléaires EDF en matière de sûreté nucléaire. La mise en configuration des circuits, la gestion des essais périodiques et des essais de requalification restent néanmoins des domaines montrant des points de fragilité.

En revanche, en matière de protection de l’environnement et, dans une moindre mesure en radioprotection, elle considère que les performances de la centrale sont en retrait de l’appréciation générale que porte l’ASN sur les centrales nucléaires EDF. En effet, plusieurs événements et des problématiques d’inétanchéité de rétentions ont conduit, en 2023, à des contournements des voies normales de rejets, sans atteinte à l’environnement. Par ailleurs, si l’exposition des travailleurs est maîtrisée, l’ASN note des fragilités persistantes dans le domaine de la propreté radiologique.

Centrale nucléaire de Saint-Alban

La centrale nucléaire de Saint Alban/Saint Maurice, exploitée par EDF dans le département de l’Isère, sur le territoire des communes de Saint‑Alban‑du‑Rhône et de Saint‑Maurice‑l’Exil à 40 km au sud de Lyon, est constituée de deux réacteurs à eau sous pression d’une puissance de 1 300 MWe chacun, mis en service en 1986 et 1987. Le réacteur 1 constitue l’INB 119, le réacteur 2 l’INB 120

L’ASN considère que les performances de la centrale nucléaire de Saint-Alban en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et de protection de l’environnement rejoignent l’appréciation générale que porte l’ASN sur les centrales nucléaires EDF du parc nucléaire en exploitation.

Sur la radioprotection des travailleurs, l’ASN considère que la maîtrise de l’exposition des travailleurs est satisfaisante. Cependant, au regard des événements significatifs pour la radioprotection (ESR) déclarés en 2023, l’ASN attend encore un renforcement de la culture de radioprotection, de la rigueur des activités de balisage des chantiers ainsi que de la gestion des outillages et des déchets radioactifs.

Centrale nucléaire de Cruas-Meysse

La centrale nucléaire de Cruas‑Meysse, mise en service entre 1984 et 1985 et exploitée par EDF dans le département de l’Ardèche sur le territoire des communes de Cruas et de Meysse, est constituée de quatre réacteurs à eau sous pression d’une puissance de 900 MWe chacun. Les réacteurs 1 et 2 constituent l’INB 111, les réacteurs 3 et 4 constituent l’INB 112.

L’ASN considère que les performances globales de la centrale nucléaire de Cruas‑Meysse en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et de protection de l’environnement rejoignent l’appréciation générale des performances que l’ASN porte sur les centrales nucléaires d’EDF.

Néanmoins, en matière de sûreté nucléaire, l’ASN attend une amélioration de la rigueur d’exploitation et de la préparation des activités. L’ASN a également relevé des aléas de maintenance lors des arrêts de réacteurs réalisés en 2023. L’ASN considère essentiel que le site améliore la maîtrise des activités de maintenance avant l’engagement des quatrièmes visites décennales du site, qui débuteront à l’été 2024 sur le réacteur 3.

Centrale nucléaire du Tricastin

Le site du Tricastin abrite la centrale nucléaire exploitée par EDF dans le département de la Drôme, sur la commune de Saint -Paul-Trois-Châteaux.
Cette centrale nucléaire est constituée de 4 réacteurs à eau sous pression d'une puissance de 900 Mwe chacun.
Les réacteurs n°1 et 2 constituent l'installation nucléaire de base (INB) n° 87, les réacteurs n°3 et 4 constituent l'installation nucléaire de base (INB) n° 88.

Les performances de la centrale du Tricastin en matière de sûreté nucléaire se distinguent favorablement de l’appréciation générale que porte l’ASN sur les centrales EDF. Si des fragilités ont toutefois été constatées sur la rigueur d’exploitation, avec plusieurs événements significatifs en lien avec un défaut d’application des pratiques de fiabilisation des interventions, l’ASN estime que les performances de la centrale nucléaire restent satisfaisantes, sans toutefois progresser par rapport à 2022.

En matière de radioprotection et de protection de l’environnement, les performances de la centrale nucléaire du Tricastin rejoignent globalement l’appréciation générale que l’ASN porte sur le parc nucléaire d’EDF.

Autres installations nucléaires

Site Orano du Tricastin

La plate-forme nucléaire Orano Chimie Enrichissement du Tricastin est un site nucléaire spécialisé dans la conversion et l’enrichissement de l’uranium.

L’ASN considère que le niveau de sûreté des installations du site Orano du Tricastin est satisfaisant. L’ASN a relevé en 2023 une amélioration de l’organisation pour analyser la conformité aux textes réglementaires et mettre en œuvre les remises en conformité nécessaires.

En 2023, l’ASN a mené une campagne d’inspections inopinées simultanées sur les INB 105, 138, 155, 168 et 176 portant sur la gestion des déchets dont l’objectif était de vérifier l’organisation d’Orano dans ces domaines. Ces inspections ont montré que l’exploitant s’était amélioré dans ce domaine.

Le président de l’ASN, accompagné de deux commissaires, s’est rendu en juillet 2023 sur le site. Un point d’étape a été effectué sur le projet d’extension de l’usine d’enrichissement GB II. Le collège de l’ASN a rappelé que l’ASN attend d’Orano qu’il engage les ressources utiles dans les nouveaux projets autant pour augmenter ses capacités de production que pour améliorer certaines fonctions supports, tel que le projet de nouvel atelier de maintenance des conteneurs (AMC2) ou le traitement du passif de substances radioactives entreposées sur le site. Les échanges ont également porté sur la vision d’ensemble des impacts du site, incluant la stratégie de gestion des effluents liquides à court et moyen terme.

Usines Framatome de fabrication de combustibles nucléaires de Romans-sur-Isère

Sur son site de Romans‑sur‑Isère dans la Drôme (26), la société Framatome exploite l’INB 63-U, dénommée « Usine de fabrication de combustibles nucléaires » issue de la réunion de deux INB, l’unité de fabrication d’éléments combustibles pour les réacteurs de recherche (ex‑INB 63) et l’unité de fabrication de combustibles nucléaires destinés aux REP (ex‑INB 98).

Le bilan des inspections réalisées à Romans-sur-Isère en 2023 est satisfaisant, notamment pour la mise en œuvre du nouveau plan de surveillance de l’environnement, la maîtrise du risque de criticité, la reprise de la production de combustibles à base d’uranium de retraitement enrichi (URE), la radioprotection et la gestion de crise. Une inspection de revue d’une semaine a été menée en mars 2023, sur les thèmes de la rigueur d’exploitation et de la prévention des fraudes : son bilan s’est avéré globalement positif.

Quant à la nouvelle zone uranium dite NZU, en construction depuis 2017, Framatome a sollicité en 2012 auprès de l’ASN une autorisation de mise en service partielle. L’ASN a délivré cette autorisation en octobre 2022. Des difficultés survenues en 2023 sur les essais de certains matériels conduisent une nouvelle fois Framatome à décaler à 2024 la mise en service de la NZU. L’ASN attend de Framatome une mobilisation accrue pour parvenir à mettre en service la NZU et rappelle que le niveau de sûreté de l’actuelle zone uranium ne permet pas une poursuite de son fonctionnement à long terme.

Réacteur à haut flux (RHF)

L'ILL (Institut Laüe Langevin), organisme de recherche internationale, abrite un réacteur à haut flux neutronique (RHF) de 58 MW, à eau lourde, qui produit des faisceaux de neutrons thermiques très intenses destinés à la recherche fondamentale, notamment dans les domaines de la physique du solide, de la physique neutronique et de la biologie moléculaire. Le RHF constitue l'INB 67 et accueille sur son périmètre l'EMBL (European Molecular Biology), laboratoire de recherche internationale en biologie.

Au regard des actions de contrôle qu’elle a conduites en 2023, l’ASN considère que la sûreté du RHF est satisfaisante. Après une année 2022 consacrée à d’importants travaux de jouvence et de renforcement de la sûreté de l’installation, le redémarrage du réacteur et ses cycles en 2023 n’ont pas connu de difficultés significatives.

L’ASN portera en 2024 une attention particulière aux conditions de préparation des prochaines activités à enjeux pour l’ILL (qui abrite le RHF), notamment des opérations de pré-assainissement de l’ancienne installation de détritiation et de rénovation du pont polaire. Enfin, la révision des prescriptions de l’ASN encadrant les rejets sera poursuivie en 2024.

Réacteur Superphénix

Implanté en bordure du Rhône, sur la commune de Creys-Mépieu, dans l'Isère, « Superphénix » est un réacteur à neutrons rapides d'une puissance de 1 200 MWe, refroidi par du sodium liquide. Le réacteur et ses équipements associés constituent l'INB 91.

Atelier pour l'entreposage du combustible de Creys-Malville

Implanté en bordure du Rhône, sur la commune de Creys-Mépieu, dans l'Isère, l’Atelier pour l’Entreposage du Combustible (APEC), comprend un bâtiment d’entreposage en eau (piscine) et un bâtiment d’entreposage à sec. Les assemblages combustibles usagés déchargés du coeur du réacteur de l’INB 91 sont entreposés en piscine, de même que les assemblages combustibles neufs. L'atelier constitue l'installation nucléaire de base (INB) n° 141.

L’ASN a contrôlé en 2023 la fin des opérations de découpe du bouchon du couvercle de cœur. Le grand bouchon tournant a été découpé en trois morceaux entreposés sur des plateformes d’accueil spécifiques. La cuve a été recouverte par une structure de confinement pour assurer son étanchéité en attendant son démantèlement. Cette structure de confinement sera également utilisée afin de permettre l’extraction des premiers internes de la cuve en 2024. Elle a aussi contrôlé les opérations de préparation à la construction de l’atelier du tunnel D4.

Au vu des inspections menées en 2023, l’ASN considère que la sûreté des opérations de démantèlement du réacteur Superphénix et d’exploitation de l’atelier pour l’entreposage des combustibles est assurée de manière satisfaisante.

POURSUITE DE FONCTIONNEMENT DES RÉACTEURS

 

Les installations nucléaires françaises sont autorisées sans limite de durée, mais, tous les 10 ans, l’exploitant doit réaliser un réexamen périodique. Les réexamens périodiques permettent de réexaminer la sûreté des installations. Le 4e réexamen périodique des réacteurs d’EDF revêt une importance particulière car EDF avait retenu, lors de la conception de certains systèmes, une hypothèse de 40 années de fonctionnement.

Le quatrième réexamen périodique des réacteurs de 900 MWe se traduit par des améliorations importantes de la sûreté, dont le déploiement de la phase spécifique mobilise toute la filière nucléaire. Un plan de contrôle renforcé pour les 4e visites décennales a été mis en place du fait du nombre important de modifications prévues dans le cadre du 4e réexamen périodique. Dans sa décision du 29 juin 2023, l’ASN encadre la poursuite de fonctionnement du réacteur 1 de Tricastin par des prescriptions complémentaires portant sur le niveau de l’aléa sismique et les situations de canicule que l’exploitant retient dans la démonstration de sûreté.

Comme pour les réacteurs de 900 MWe, le 4e réexamen périodique des réacteurs de 1300 MWe fait l’objet d’un processus de concertation organisé par le HCTISN et auquel participe l’ASN. Cette concertation s’est ouverte le 18 janvier 2024 et s’achèvera le 30 septembre par un webinaire de synthèse. L’ASN prendra position sur la phase générique de ce réexamen périodique en 2025. Les 4e visites décennales des réacteurs 1 et 2 de la centrale de Saint-Alban auront lieu en 2027 et 2028.

L’horizon du cinquième réexamen périodique s’avérant trop lointain pour disposer des éléments permettant de justifier les hypothèses structurantes de durée de fonctionnement à intégrer dans la politique énergétique à l’horizon 2040 et au-delà, l’ASN a demandé à EDF de réaliser des analyses préliminaires sur la capacité des réacteurs à poursuivre leur fonctionnement au-delà de 50 ans. À la demande du Gouvernement, l’ASN a émis un avis en juin 2023 sur les conclusions de l’analyse d’EDF, soulignant les sujets techniques majeurs associés à une durée de fonctionnement jusqu’à 60 ans, ainsi que les sujets à traiter prioritairement.

En savoir plus :


L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), autorité administrative indépendante, assure, au nom de l’Etat, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les personnes et l’environnement. Elle informe le public et contribue à des choix de sociétés éclairés. Le rapport de l’ASN sur l’état de sûreté nucléaire et de radioprotection en France en 2021 est téléchargeable en ligne

Publié le 16/05/2024

La sûreté nucléaire et la radioprotection en France en 2023

Le niveau de sûreté des installations nucléaires a été satisfaisant en 2023 avec une moindre tension sur les installations du cycle du combustible qu’en 2022 et la mise en œuvre par EDF d’une stratégie jugée appropriée par l’ASN pour faire face et traiter le phénomène de corrosion sous contrainte apparu sur certains de ses réacteurs. Les performances en matière de radioprotection se sont maintenues à un bon niveau malgré une augmentation, dans le secteur médical, d’événements significatifs de niveau 2. Cette situation contrastée conduit à rappeler l’importance des analyses de risques en radiothérapie.

 

Contact presse :
Evangelia PETIT, cheffe du service presse - 01 46 16 41 42 -  evangelia.petit@asn.fr

Date de la dernière mise à jour : 19/09/2024