Région Grand Est : en 2023, le niveau de la sûreté nucléaire et de la radioprotection reste globalement satisfaisant

Publié le 20/09/2024 à 10:00

Communiqué de presse

Les divisions territoriales de Strasbourg et de Châlons-en-Champagne de l’ASN présentent les conclusions des actions de contrôle menées tout au long de l’année 2023 en région Grand Est.

L’activité de contrôle de l’ASN en 2023 en région Grand Est

 

180 inspections :

  • 63 dans les centrales nucléaires en exploitation ;
  • 12 dans les installations de stockage de déchets radioactifs et sur les sites des centrales nucléaires de Fessenheim et de Chooz A en démantèlement ;
  • 93 dans le nucléaire de proximité ;
  • 8 sur le thème du transport de substances radioactives ;
  • 4 concernant des organismes ou laboratoires agréés.

17 événements significatifs de niveau supérieur ou égal à 1 ont été déclarés à l’ASN :

  • 11 événements significatifs de niveau 1 sur l’échelle INES et 1 de niveau 2 déclarés par les exploitants des installations nucléaires de base ;
  • 3 événements de niveau 1 sur l’échelle INES dans le domaine du nucléaire de proximité (2 dans le domaine industriel, 1 dans le domaine médical) ;
  • 2 événements significatifs concernant les patients dans le domaine de la radiothérapie, classés au niveau 1 de l’échelle ASN-SFRO.

17 journées d’inspection du travail dans les centrales nucléaires.

Le contrôle des installations nucléaires

Centrale nucléaire de Cattenom

Le site de Cattenom abrite la centrale nucléaire exploitée par EDF dans le département de la Moselle, à 5 km de Thionville.
Le site se trouve à 10 km du Luxembourg et de l'Allemagne. Cette centrale nucléaire est constituée de 4 réacteurs à eau sous pression d'une puissance de 1300 MWe.
Les réacteurs 1, 2, 3 et 4 constituent respectivement les installations nucléaires de base (INB) 124, 125, 126 et 137.

L’ASN considère que les performances de la centrale nucléaire de Cattenom rejoignent l’appréciation générale que l’ASN porte sur les centrales nucléaires d’EDF en matière de sûreté nucléaire et de protection de l’environnement mais est jugée en retrait en matière de radioprotection. L’année 2023 a, comme 2022, constitué une année particulière compte tenu d’arrêts longs pour traiter la problématique de corrosion sous contrainte des circuits d’injection de sécurité. En outre, la thématique de la prévention du risque incendie est en progrès mais reste un point d’attention.

Sur le plan de l’exploitation et de la conduite des réacteurs, la gestion des compétences et la maîtrise de la réactivité sont jugées à un très bon niveau, tandis que des faiblesses ont été identifiées sur la gestion des configurations des circuits et des consignations associées ainsi que sur la surveillance en salle de commande.

Concernant la maintenance des installations, l’année 2023 a été marquée par des arrêts de réacteurs relativement longs et souvent concomitants. La surveillance des activités de maintenance est notée positivement ainsi que la bonne gestion des interventions fortuites lors des arrêts. Néanmoins, quelques non-qualités de maintenance ont été relevées et des événements interrogent le caractère suffisant des essais menés sur certains équipements après des travaux.

En matière de radioprotection, l’ASN considère le site en retrait, notamment concernant la maîtrise de la contamination et des tirs radiographiques. Néanmoins, des améliorations ont été notées, ce qui démontre une bonne prise de conscience par le site de ses fragilités. 2023 a été marquée par un évènement significatif de niveau 2 relatif à la contamination d’un agent.

Quant à la protection de l’environnement, si le site a progressé en 2023 avec notamment une diminution du nombre d’événements, des faiblesses demeurent sur la thématique du confinement des pollutions liquides.

Centrale nucléaire de Chooz B

Le site de Chooz regroupe notamment les réacteurs de la centrale nucléaire dite Chooz B implantée dans les Ardennes, à la pointe nord du département. Le site se trouve à moins de 10 km de la Belgique.
Exploitée par EDF, cette centrale est constituée de deux réacteurs à eau sous pression d'une puissance de 1450 MWe. Ces réacteurs ont été mis en service en 1996 et 1997.

L’ASN considère que les performances de la centrale nucléaire de Chooz se distinguent favorablement en matière de protection de l’environnement, et qu’elles rejoignent l’appréciation générale que l’ASN porte sur les centrales nucléaires d’EDF en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Le niveau de sûreté est considéré satisfaisant, mais une vigilance particulière doit être portée sur le strict respect des documents de conduite des réacteurs, ainsi que sur le contrôle des activités réalisées, ces deux points ayant notamment été à l’origine d’événements significatifs en 2023. Les activités liées à la maintenance des installations ont été gérées de manière satisfaisante, dans un contexte de redémarrage des réacteurs après les opérations de réparation des tuyauteries présentant des fissures de corrosion sous contrainte.

Plusieurs fragilités ont été relevées dans le domaine de la radioprotection, et des lacunes dans la maîtrise de la propreté radiologique ont été à l’origine de la contamination de plusieurs locaux. Si l’ASN note la mise en œuvre d’actions correctives immédiates, elle invite l’exploitant à maintenir sa vigilance.

Quant à la protection de l’environnement, l’organisation du site est considérée satisfaisante et l’exploitant a démontré une organisation robuste pour l’identification, l’analyse et le suivi des quelques situations d’écarts rencontrées en 2023.

Les travaux entrepris en 2023 ont principalement été consacrés à la préparation des opérations de levée de la cuve en vue de sa découpe, programmées à partir de 2024.

Les contrôles réalisés par l’ASN en 2023 ont confirmé que les actions engagées par l’exploitant pour maîtriser la propreté radiologique des installations et assurer la protection des travailleurs continuent de faire progresser le niveau de radioprotection sur le site.

Centrale nucléaire de Fessenheim

La centrale nucléaire de Fessenheim comprend deux REP, d’une puissance unitaire de 900 MWe. Elle est située à 1,5 km de la frontière allemande et à 30 km environ de la Suisse. Les deux réacteurs, mis en service en 1977 et arrêtés définitivement en 2020, sont en période de préparation au démantèlement.

L’ASN considère que le site poursuit l’exploitation des installations et la préparation du démantèlement de manière sérieuse.

En matière de radioprotection, les performances du site sont considérées comme globalement satisfaisantes.

Le site a connu un changement organisationnel profond et une importante réduction d’effectifs, en adéquation avec l’évolution des activités sur le site. L’ASN considère que la conduite du changement a été bien menée pour préparer la transition organisationnelle au mieux.

Les activités préparatoires au démantèlement se sont poursuivies avec notamment la décontamination du circuit primaire du réacteur 2, marquée par quelques aléas. Hormis ces aléas, les différentes activités préparatoires au démantèlement se sont déroulées conformément à l’attendu.

Par ailleurs, l’instruction du dossier de démantèlement se poursuit, avec notamment la finalisation en mai 2023 de la phase d’expertise par l’IRSN et l’avis rendu par le groupe permanent d’experts démantèlement de l’ASN en juin 2023. Le dossier de démantèlement a fait l’objet d’une enquête publique au début du 2ème trimestre 2024 dans l’objectif d’aboutir à un décret encadrant les opérations de démantèlement en 2026.

Centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine

La centrale nucléaire de Nogent‑sur‑Seine, exploitée par EDF dans le département de l’Aube, dans la commune de Nogent‑sur‑Seine à 70 km au nord‑ouest de Troyes, est constituée de deux réacteurs à eau sous pression d’une puissance de 1 300 MWe chacun, mis en service en 1987 et 1988. Le réacteur 1 constitue l’INB 129, le réacteur 2 l’INB 130.

L’ASN considère que les performances de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine rejoignent l’appréciation générale que l’ASN porte sur les centrales nucléaires d’EDF en matière de sûreté nucléaire, de protection de l’environnement et de radioprotection. L’année 2023 a notamment été marquée par la réalisation d’une inspection de revue du site, en septembre 2023, sur les thèmes du management de la sûreté, de la conduite des installations, de la maintenance, ainsi que de la gestion des écarts et des modifications matérielles.

Dans le domaine de la sûreté nucléaire, les résultats sont corrects, hormis en matière de gestion des consignations de matériel et de gestion des écarts de conformité, où des progrès sont attendus. L’exploitant doit aussi poursuivre ses efforts pour maintenir un effectif et des compétences suffisants dans les domaines de la conduite et de la maintenance des réacteurs.

En matière de radioprotection, les résultats sont satisfaisants, mais des défauts de culture de radioprotection ou de rigueur des intervenants ont été relevés à plusieurs reprises. Une vigilance particulière de l’exploitant doit être maintenue sur ce sujet.

L’organisation du site en matière de protection de l’environnement est considérée satisfaisante, mais des améliorations sont attendues dans la prise en compte du retour d’expérience relatif à certaines opérations de maintenance, ainsi que dans la gestion des rejets et du confinement des pollutions liquides.

Centre de stockage de l'Aube (CSA)

Le site nucléaire de Soulaines-Dhuys (Aube) abrite le centre de stockage de l'Aube exploité par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). Il est situé à environ 50 km de Troyes. Ce site constitue l'installation nucléaire de base (INB) 149.

L’ASN considère que le CSA est exploité dans des conditions satisfaisantes dans les domaines de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et de l’environnement.  Les inspections menées en 2023 ont notamment permis de constater une organisation adaptée en matière de surveillance des rejets et de l’environnement, de suivi et de contrôle des opérations de génie civil, et plus généralement un management satisfaisant de la sûreté nucléaire de l’installation.

Projet de centre de stockage en couche geologique profonde Cigéo

Cigéo est le projet de centre de stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde porté par l’ANDRA. Conformément aux termes de la loi du 28 juin 2006 aujourd’hui codifiée, Cigéo est conçu et dimensionné par l’ANDRA pour stocker les déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue (HA-MAVL).

La demande d’autorisation de création a été déposée le 16 janvier 2023 et l’ASN en a initié le processus d’instruction technique associé, avec l’appui de l’IRSN. Ce processus s’étendra sur une durée prévisionnelle de trois ans et sera jalonné de trois réunions du groupe permanent d’experts de l’ASN pour les déchets, dont la première s’est déjà tenue. À l’issue de l’instruction technique, l’ASN rendra l’avis prévu par les dispositions de l’article L. 542-10-1 du code de l’environnement. La durée de la totalité du processus d’autorisation est estimée à environ cinq ans, comportant également une phase de consultations et une enquête publique.

Un processus de concertation inédit a été mis en œuvre autour du processus d’instruction technique. Une vingtaine d’organisations ont ainsi été consultées dans le cadre de l’élaboration de la saisine de l’IRSN, afin de prendre en compte leurs attentes et préoccupations dans le cadrage de l’instruction technique.

Cette instruction technique s’articule autour de l’évaluation de trois thématiques :

  • les données de base retenues pour l’évaluation de sûreté de Cigéo ;
  • la sûreté en phase d’exploitation des installations de surface et souterraines ;
  • la sûreté à long terme après la fermeture.

Le groupe permanent d’experts pour les déchets, dont la saisine avait également fait l’objet d’une concertation avec les parties prenantes précitées, a déjà examiné, fin avril 2024, le premier groupement thématique. Les recommandations qui en résultent ont fait l’objet de demandes complémentaires de l’ASN adressées à l’Andra. Le même processus sera suivi pour l’analyse des autres thématiques.

Les recommandations et positions du groupe permanent d’experts pour les déchets qui sont ou seront formulées contribueront à fonder l’avis que rendra l’ASN sur la demande d’autorisation de création.

NUCLÉAIRE DE PROXIMITÉ

Domaine médical

L’ASN considère que l’état de radioprotection dans le domaine médical est satisfaisant, mais que des fragilités persistent, notamment dans le domaine des pratiques interventionnelles radioguidées (PIR). Par ailleurs, quel que soit son niveau de maturité, la culture de radioprotection doit rester vivante afin d’éviter de répéter des erreurs du passé. Ainsi, dans le domaine de la radiothérapie notamment, l’ASN constate que la démarche de retour d’expérience est contrastée suivant les centres en région Grand Est ; l’ASN souligne la nécessité de redonner du sens à cette démarche afin de maintenir l’intérêt des professionnels et de garder une dynamique collective.

Une attention particulière est portée aux signaux faibles observés dans un contexte général de manque de moyens, parfois financiers, mais surtout humains. D’autres évolutions – recours, pour l’imagerie médicale, à des prestations insuffisamment maîtrisées en radioprotection ou en physique médicale et complexification des organisations – pourraient par ailleurs conduire à dégrader la situation actuelle.

L’ASN attire l’attention des décideurs sur la nécessité d’évaluer l’impact de ces évolutions sur les organisations et le travail des intervenants et de définir précisément les rôles et les responsabilités de l’ensemble des acteurs. La responsabilisation de l’ensemble des acteurs est nécessaire pour assurer le maintien et le développement de la culture de radioprotection.

Domaine industriel et recherche

L’ASN constate que les entreprises de radiographie industrielle ont, dans leur grande majorité, maintenu la rigueur nécessaire pour respecter les obligations réglementaires en matière de radioprotection. Cependant, un effort conséquent reste à mener par bon nombre d’entreprises pour définir correctement le programme des vérifications exigées par le code du travail, le mettre en œuvre, corriger les éventuelles non-conformités relevées à cette occasion et assurer la traçabilité des corrections apportées. De plus, l’ASN juge toujours préoccupants les défauts observés en matière de signalisation de la zone d’opération lors des chantiers, même si une légère amélioration est observée par rapport à 2022. L’ASN estime, plus généralement, que les donneurs d’ordre devraient privilégier, lorsque c’est possible, les prestations de radiographie industrielle dans des casemates et non sur chantier.

Concernant les laboratoires de recherche, le niveau de radioprotection est jugé globalement satisfaisant et la tendance à l’amélioration des pratiques se poursuit. Les conditions d’entreposage et d’élimination des sources scellées en fin de vie, des déchets et des effluents radioactifs ainsi que la conformité des locaux constituent les principales difficultés rencontrées par les établissements de recherche.

La prévention du risque lié au radon

L’ASN a poursuivi en Grand Est son activité d’évaluation des actions conduites pour la gestion du risque lié au radon, aussi bien dans les établissements recevant du public (ERP) que sur les lieux de travail. Trois gestionnaires d’ERP et deux établissements thermaux ont ainsi été inspectés. Il en ressort que les démarches de prise en compte du risque lié au radon ont été entamées, avec néanmoins des insuffisances notées sur le suivi dans le temps ainsi qu’en matière de radioprotection des travailleurs.

En savoir plus :

 


L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), autorité administrative indépendante, assure, au nom de l’Etat, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les personnes et l’environnement. Elle informe le public et contribue à des choix de sociétés éclairés. Le rapport de l’ASN sur l’état de sûreté nucléaire et de radioprotection en France en 2021 est téléchargeable en ligne

Publié le 16/05/2024

La sûreté nucléaire et la radioprotection en France en 2023

Le niveau de sûreté des installations nucléaires a été satisfaisant en 2023 avec une moindre tension sur les installations du cycle du combustible qu’en 2022 et la mise en œuvre par EDF d’une stratégie jugée appropriée par l’ASN pour faire face et traiter le phénomène de corrosion sous contrainte apparu sur certains de ses réacteurs. Les performances en matière de radioprotection se sont maintenues à un bon niveau malgré une augmentation, dans le secteur médical, d’événements significatifs de niveau 2. Cette situation contrastée conduit à rappeler l’importance des analyses de risques en radiothérapie.

 

Contact presse :
Evangelia PETIT, cheffe du service presse - 01 46 16 41 42 -  evangelia.petit@asn.fr

Date de la dernière mise à jour : 19/09/2024