Projet de décision réglementaire de l’ASN relative aux équipements sous pression nucléaires, encadrant la réalisation de certains essais et analyses.

A) Sur le périmètre des objets soumis à l’exigence
-> Exclusions
Dans un souci de cohérence et pour des réalités industrielles, il conviendrait d’ajouter à la liste des exclusions certaines pièces mineures, dans la ligne des exclusions déjà présentes. En particulier :
- les bouchons de niveau N1 ou N2 et de DN ≤ 50,
- les doigts de gants et leurs bossages associés de niveau N1 ou N2 et de DN ≤ 50.
Ces composants sont réalisés de manière similaire à celle des piquages et bossages, par usinage dans la masse : ils présentent la même contrainte industrielle que celle des composants non soumis. Ils sont de dimensions similaires, voire plus petites. Une approche proportionnée aux enjeux conduirait à ne pas soumettre ces composants.
De plus, les essais sur matériaux irradiés ne devraient pas être concernés. Les exploitants doivent parfois réaliser des essais sur des matériels existant irradiés (quelques cas existent où l’article 8-2 serait applicable). Ces essais sont alors réalisés par un ‘’laboratoire chaud’’, généralement appartenant à l’exploitant. De par leurs spécificités, la faisabilité de ces laboratoires chauds sur tout le périmètre de la décision n’est pas acquise. Il conviendrait donc d’exclure les essais sur matériaux irradiés du périmètre de soumission, afin d’éviter le recours à des aménagements.
Ces précisions seraient à apporter aux articles 1-1 et 1-4.

-> À clarifier, risque de surinterprétation du requis
Le projet de décision vise ‘’les essais contribuant à la justification…’’ pour les équipements listés. Suivant le lecteur, ‘’contribuant la justification’’ reste vague, et peut être interprétée de manière plus ou moins extensive. Il en est de même des articles 1-3 et 1-5 : ‘’Les coupons témoins des assemblages soudés concernés par l’évaluation de la conformité des équipements …‘’.
Ainsi, il pourrait être interprété que les essais nécessaires à la justification d’une QMOS (qualification de mode opératoire de soudage) soient soumis (essais sur coupons témoins des QMOS). Il en est de même pour la justification du code ou pour les diverses qualifications requises par le code (qualification des matériaux d’apport, vérification de l’aptitude des matériaux au soudage, justification de l’aptitude des matériaux, qualification de procédés de formage, qualification M 140).
Afin de lever toute ambiguïté de lecture, il conviendrait :
- soit de préciser aux articles 1-1 et 1-4 que les différentes qualifications requises par le code de conception-fabrication de l’équipement ne sont pas soumises à l’exigence (l’exigence de QT restant requise par ailleurs et à l’article 1-2) et que les essais nécessaires à l’élaboration d’un code de conception-fabrication ne sont pas soumis à l’exigence.
- soit de préciser que seuls sont requis les essais de recette des métaux de base, recette des produits d’apport, essais de QT, essais de justification dans le cadre du traitement des écarts.

B) Sur la liste des essais
Les essais et les normes associées sont précisés en annexe. Il conviendrait d’être clair pour l’essai de traction longitudinale du métal fondu des soudures selon la norme ISO 5178 : ce requis ne s’applique que pour des assemblages plans (et non pas pour les assemblages tubulaires).
Cette précision peut être apportée en modifiant l’intitulée de la ligne ‘’Essai de traction longitudinale du métal fondu des soudures sur coupons témoins d’assemblage soudé’’ dans le tableau en annexe.

C) Sur le mode de preuve
Le projet de décision ne précise pas le mode de preuve du respect de l’exigence.
Il est clair pour la profession qu’un logo de l’organisme accréditeur sur le rapport d’essai est une preuve recevable.
Cependant, l’AFCEN souhaite attirer l’attention de l’ASN sur les limites de la rédaction de l’article 2.
i. L’expression ‘’… doivent être réalisés par des laboratoires accrédités’’ contient un attendu implicite. Cependant, elle peut être lue de plusieurs manières différentes. Un ‘’essai réalisé sous couvert d’accréditation’’ n’est pas strictement identique à un ‘’essai réalisé par un laboratoire accrédité’’.
À ce jour, des essais sont réalisés par des laboratoires accrédités sans que le logo de l’organisme accréditeur ne soit apposé sur le rapport d’essai.
ii. L’AFCEN anticipe des difficultés à obtenir systématiquement des rapports d’essais portant le logo de l’organisme accréditeur. Cette difficulté surviendra systématiquement lors des évolutions normatives, qui induisent un déphasage entre les essais à réaliser (décrits par le code) et les attestations d’accréditation (au dernier indice de la norme comme encouragé par le COFRAC) (1).
En conséquence, l’AFCEN recommande que la rédaction de l’article 2 cite les modes de preuve suivants pour être explicite :
a) le rapport d’essais avec la marque d’accréditation telle que prévue par les organismes accréditeurs,
b) le rapport d’essais accompagné de l’attestation d’accréditation du laboratoire, alternativement la référence de l’attestation d’accréditation, pour l’une des normes listées en annexe à la décision pour une nature d’essai donnée.
(1) On notera que le principe d’une portée d’accréditation FIXE ou FLEX1 mis en place par le COFRAC en France ne se retrouve pas à l’étranger. Un nombre important de laboratoires accrédités à ce jour ne sont pas à même de réaliser sous couvert d’accréditation des essais suivant une version N-1 d’une norme.

D) Sur les modalités de mise en œuvre de l’exigence
Il conviendrait de préciser dans la décision les modalités opérationnelles lorsqu’un fabricant d’équipement doit refaire des essais.
À date, lorsqu’un fabricant d’équipement est amené à devoir refaire des essais sous accréditation, conformément à la possibilité amenée par l’article 8-2, la décision ne précise pas le statut de ces essais par rapport aux essais du fabricant de matériaux (qui garantit les propriétés du matériau), ni les modalités opérationnelles associées (notamment en cas d’essais non conformes). Ce point est à mettre en regard de la pratique actuelle (guide ASN n°8, fiche COLEN N006 en cours de discussion).
Afin de rendre la décision pleinement opérationnelle dès sa publication et d’éviter des questionnements ultérieurs, l’AFCEN recommande que les modalités essentielles pour ces nouveaux essais soient précisées :
a) La place des nouveaux essais vis-à-vis des essais originaux dans la démonstration de conformité, notamment en regard avec la garantie des caractéristiques matériaux apportée par le fabricant de matériaux, garantie que ces nouveaux essais ne sauraient abolir. En particulier, il n’existera pas de ‘’certificat 3.1’’ à l’issu des essais complémentaires, mais uniquement des rapports d’essais émis par le laboratoire accrédité.
b) Les dispositions permettant, à partir des rapports d’essais, de juger de l’acceptabilité de la pièce. L’AFCEN considère que les modalités opérationnelles des nouveaux essais doivent être identiques aux modalités des tests originaux. En particulier, les codes permettent (parfois) et encadrent la réalisation de contre-essais. La possibilité de contre-essais, décrite par le code, ne doit pas être interdite.
Nota : il conviendra que la rédaction de la fiche COLEN N006 prenne en compte la décision.
L’AFCEN propose d’ajouter à la décision un article dédié à ces modalités, par exemple :
Dans le cas où un fabricant est amené à compléter, au sens du deuxième alinéa de l’article 8-2, les essais de recette d’un fournisseur de matériaux par des essais complémentaires réalisés sous accréditation, les rapports d’essais complémentaires sont utilisés comme mode de preuve pour juger de la conformité de la PPP aux requis. À partir des essais complémentaires, les modalités permettant de juger de la conformité de la pièce aux requis sont celles décrites dans le code de conception et fabrication de l’équipement.
Les garanties indiquées sur la documentation du fournisseur de matériaux ne sont pas modifiées par les essais complémentaires.

E) Sur les modalités alternatives jugées équivalentes à une accréditation
Face aux difficultés probables de montée en gamme de la filière, et pour rendre opérationnelle et industrielle la décision à long terme et minimiser les recours à des demandes d’aménagement, l’AFCEN a proposé des situations où le requis d’accréditation pourrait ne pas être exigé.
En particulier, les deux situations suivantes nous paraissent légitimes et à considérer dans la décision.

Cas d’un essai supervisé par un OH
Le guide ASN n° 8 introduit le cas d’essais complémentaires, pour lesquels il est requis soit la supervision par un OH, soit le recours à un laboratoire accrédité. Ce guide juge les deux pratiques équivalentes.
En cas de difficulté à trouver un laboratoire accrédité, un fabricant devrait pouvoir recourir à la supervision des essais par un OH. Cela donnerait une certaine souplesse à la filière en cas de point dur, tout en garantissant à l’ASN un niveau de qualité équivalent.

Cas d’une solution ‘’Essais numérisées’’
D’un essai réalisé sous accréditation, la profession ne récupère que la valeur finale à retenir. Les conditions exactes de réalisation de l’essai (vitesse de traction…) et les résultats complets (courbes…) ne sont pas conservés, ni mis à disposition du Fabricant ou de l’exploitant. Il s’avère que ces données détaillées sont très utiles pour s’assurer de la qualité de réalisation d’un essai, voire réaliser un contre-dépouillement a posteriori, mettre en place des vérifications automatiques en parade, etc.
Le recours aux solutions numériques couplées à un mécanisme de garantie d’origine des données est rendu possible par les avancées technologiques récentes (blockchain). Un test grandeur nature a été réalisé par EDF en ce sens.
Au vu du potentiel d’une telle avancée numérique, dont les bénéfices sont majeurs tant du point de vue qualité des essais que du point de vue lutte contre la fraude, l’AFCEN considère qu’il serait regrettable de ne pas susciter l’émergence d’une telle mutation de la filière des laboratoires.
Cependant, les enquêtes réalisées montrent un intérêt des laboratoires pour une telle avancée technologique si elle est vue comme une alternative à un requis d’accréditation.
Il conviendrait donc que l’une des modalités alternatives jugées équivalente à une accréditation soit le recours à une solution numérique dûment approuvée par l’ASN.

Être dans l’un ou l’autre cas devrait permettre au fabricant de l’équipement de ne pas être soumis à l’exigence d’accréditation.

F) Sur le volet éditorial
Art 1-1 : "Les parties principales sous pression des équipements sous pression nucléaires mentionnés au 1 de l’article 1er de l’annexe I de l’arrêté du 30 décembre 2015 susvisé"
Nous supposons qu’il faut lire : "Les parties principales sous pression des équipements sous pression nucléaires mentionnés au 1 de l’annexe I de l’arrêté du 30 décembre 2015 susvisé"

Art 1-2 : "Les qualifications techniques mentionnées à l’article 3.2"
Dans les annexes de l’arrêté ESPN, ce ne sont pas des articles mais des points.

Art 1-4 : "Les parties principales sous pression des équipements sous pression nucléaires de niveau N2 de types récipients de catégories I à IV, ..."
Nous aurions plutôt écrit ‘’de type récipient’’.

Art. 4 : "En cas de difficultés particulières d’application, l’Autorité de sûreté nucléaire peut, sur demande dûment justifiée du fabricant …"
Il convient de préciser qu’il s’agit du fabricant d’équipement (pour ne pas confondre avec le fabricant de matériaux).