78 Le tritium dans l’environnement Les mécanismes d’intégration du tritium à la manière organique des végétaux ne conduisent pas à démontrer un phénomène de bioaccumulation au sens défini au paragraphe 2.2.3, mais peuvent conduire à une rémanence du tritium dans certains compartiments (par exemple, les bois d’arbres), pour des durées plus ou moins longues. En l’occurrence, les processus d’incorporation et de relâchement du tritium dans les végétaux apparaissent éminemment variables et, pour certains d’entre eux, sont encore, sinon méconnus, du moins mal quantifiés ; ils dépendent fortement : • du niveau, de la durée, de la saison (et même de la condition journuit) de la contamination du milieu ambiant ; • des paramètres agro-climatiques : saison, humidité de l’air et du sol, présence-absence de pluie et caractéristique des précipitations ; • des types et des stades végétatifs des plantes. Ces conclusions sur l’absence probable de bioaccumulation du tritium tirées de l’étude, encore imparfaite, des mécanismes d’incorporation et d’échange du tritium dans les végétaux terrestres, rejoignent celles déduites des résultats d’observation dans l’environnement (cf. § 5.1.3) qui tendent à montrer que les niveaux de tritium organiquement lié dans les végétaux décroissent plus vite que la période radioactive du tritium et que les activités de tritium des végétaux (exprimées en Bq/L) sont dans la gamme des valeurs observées dans les eaux de pluie. 6 1 5 Incorporation et devenir du tritium dans les animaux de cheptel Les publications relatives à l’incorporation et au devenir du tritium dans les animaux de cheptel sont rares, si l’on excepte celles relatives à la modélisation du comportement du tritium dans les animaux en vue d’estimer les activités volumiques ou massiques dans les productions (laits, viandes…) qui reflètent notamment les travaux réalisés dans le cadre de collaborations internationales10 (Galeriu et al., 2001 ; 2005 ; 2007 ; 2009). Deux processus permettent l’incorporation de tritiumdans les animaux : l’ingestion — affouragement et abreuvage — et l’absorption de vapeur d’eau par inhalation et passage à travers la peau (Belot et al., 1996). Absorption du tritium. L’absorption de tritium par inhalation de vapeur d’eau tritiée est rapide et quasi totale, 99 % du tritium inhalé sous cette forme étant retenus dans le corps de l’animal au bout de quelques secondes. Dans celui-ci, l’eau tritiée diffuse librement et rapidement à travers toutes les membranes cellulaires et s’équilibre avec les fluides corporels en quelques minutes (Belot et al., 1996). L’inhalation de dihydrogène tritié HT (très peu soluble, mais susceptible d’être faiblement oxydé en HTO) ne conduit qu’à très peu d’incorporation : il a été estimé que son « efficacité » en termes de rétention serait 1 500 fois moindre que celle de l’eau tritiée. L’absorption transcutanée est à peu près égale à l’absorption par inhalation. L’absorption d’eau tritiée se fait également par ingestion d’eau de boisson tritiée ou par ingestion d’aliments tritiés. L’eau tritiée ainsi ingérée apparaît en quelques minutes dans le sang veineux, ainsi que dans les divers organes, fluides et tissus du corps. Une très faible fraction du tritium absorbé sous forme d’eau tritiée peut être incorporée dans les molécules organiques de l’organisme sous forme de tritium organique OBT non échangeable (Belot et al., 1996), à l’occasionde réactions de biosynthèse. Du tritiumpeut être aussi absorbé sous forme de molécules organiques tritiées présentes dans la nourriture (lipides, glucides, protéines, acides aminés…) qui ont un comportement métabolique tout à fait différent de celui du tritium de l’eau tritiée. Le tritium organiquement lié ingéré n’est pas entièrement oxydé dans le corps à l’état d’eau tritiée. Les aliments tritiés sont transformés dans le processus digestif en molécules organiques plus petites. Ces dernières entrent dans la circulation sanguine qui les transporte au sein des cellules où elles sont métabolisées. Seule une partie du tritium organique est transformée dans le corps en eau tritiée au cours du catabolisme des aliments pour se mélanger ensuite à l’eau corporelle ; le reste est intégré à de nouvelles molécules organiques (biosynthèse) plus ou moins pérennes dans l’organisme. En conséquence, le taux d’incorporation de tritium dans la fraction organique du corps sera plus grand après ingestion de tritium organique qu’après ingestion d’eau tritiée (Belot et al., 1996). Élimination du tritium. Le tritium est généralement éliminé du corps des animaux sous la forme d’eau tritiée : urine, fèces, vapeur d’eau exhalée et transpiration. La relation entre le volume d’eau dans l’animal et la perte d’eau journalière est le facteur déterminant du temps de renouvellement du tritium dans le corps lorsque l’animal a été contaminé. La courbe d’élimination urinaire du tritiummontre plusieurs phases : habituellement, 97 % du tritium est éliminé avec une demi-vie de quelques jours ; le reste du tritium, correspondant à la fraction organiquement liée dans l’organisme, est éliminé avec des demi-vies plus longues de quelques dizaines à quelques centaines de jours, selon le métabolisme des molécules organiques tritiées (Belot et al., 1996). La figure 6.7 (Thorne, 2003) schématise les connaissances actuelles relatives aux voies d’incorporation des formes du tritium dans les animaux. 10 Laboratoires de Roumanie, Royaume Uni, U.S.A. et Belgique. Figure 6.7 - Transferts de tritium aux produits d’origine animale, d’après Thorne, 2003.
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