37 Sources de production et gestion du tritium produit par les installations nucléaires Les deux dernières techniques séparatives font actuellement l’objet de nombreuses études à l’échelle du laboratoire dans le cadre notamment des recherches sur la séparation/transmutation des actinides, la séparation électrolytique en milieu de chlorures fondus ayant été en particulier déjà appliquée au traitement de quelques centaines de kg de combustibles métalliques RNR aux Etats-Unis et en Russie [35]. Ces procédés, appliqués au traitement de combustibles UOX, consisteraient, après une éventuelle étape de cisaillage ou de dégainage du combustible, à dissoudre ce dernier et à séparer les espèces chimiques présentes dans des sels fondus à des températures pouvant varier de 500 à plus de 1000 °C. La destructuration de l’oxyde d’uranium permettrait ainsi de relâcher le tritium, les gaz rares et les autres produits de fission volatils dans les effluents gazeux du procédé et de récupérer ces différents radionucléides après un traitement adapté. Toutefois, ces procédés pyrométallurgiques nécessitent encore de très nombreux développements et ne pourraient être, en tout état de cause, envisagés que dans le cadre de futures usines de traitement associées aux réacteurs de quatrième génération. 5 1 3 Procédé TRILEX Ce procédé, déjà partiellement mis en œuvre dans les usines de La Hague, consiste, outre l’établissement d’un « barrage tritium » au niveau du premier cycle d’extraction (cf. ci-dessus), à limiter au maximum les ajouts d’eau fraîche dans la zone tritiée de l’usine par l’utilisation de réactifs anhydres ou en solution aqueuse concentrée et le recyclage en tête d’usine d’une quantité maximale d’acide tritié provenant de l’unité de récupération de l’acide tritié. Ce mode de fonctionnement permet ainsi de minimiser le volume d’eau tritiée extrait du procédé et de le rendre compatible avec un procédé de séparation isotopique [36]. Toutefois, l’obtention d’une réduction significative du volume d’effluents à traiter (quantité minimale d’eau introduite dans le cycle comprise entre 500 et 1 000 L.t Ui -1 selon les hypothèses retenues [37]) nécessiterait de modifier profondément la conception des usines existantes et entraînerait de fait une augmentation significative de l’inventaire et de la concentration en tritium dans la zone tritiée qui conduirait à une augmentation des risques de rejets de ce radionucléide dans les effluents gazeux et à des risques accrus de contamination des opérateurs, en cas par exemple de perte de confinement des équipements, enceintes ou boîtes à gants (le problème serait a priori similaire pour les autres radionucléides accompagnant le tritium et fonction des facteurs de décontamination obtenus). Les unités de traitement des gaz, nécessaires pour gérer ces risques, génèreraient à leur tour des volumes d’effluents supplémentaires allant à l’encontre des facteurs de réduction visés. De plus, l’accumulation considérable de tritiumdans la zone tritiée de l’usine nécessiterait également d’augmenter significativement l’efficacité du barrage tritium. 5 1 4 Distillation sous vide Ce procédé, déjà accessible industriellement22, est basé sur la différence de volatilité entre les isotopes de l’eau. Le facteur de séparation augmentant lorsque la température diminue, la distillation est généralement effectuée sous vide (facteur de séparation de l’ordre de 1,06 à 50 °C et 100 mbar). Ce facteur reste néanmoins très proche de 1 et nécessite par conséquent un grand nombre d’étages théoriques et un fort reflux. Des essais réalisés à très faible débit (1 L.h-1) au centre d’études de Mol (Belgique) ont permis d’obtenir un facteur de concentration de l’ordre de 1000. Toutefois, le traitement de flux extrêmement dilués nécessiterait des installations de très grande taille et une puissance électrique très élevée. Pour information, les études menées par AREVA [17] indiquent que, pour une usine traitant 1 700 t.an-1 de combustibles, l’unité de distillation qui serait nécessaire au traitement du flux de tritium (de l’ordre de 108 Bq.L-1) devrait comporter un nombre de colonnes de diamètre 4 m équivalent à une hauteur totale de plus de 300 m, soit plus de 4 000 m3 de garnissage, et conduirait à une consommation énergétique très élevée de l’ordre de 130 MW. De plus, le matériau de garnissage utilisé (cuivre oxydé) est sensible aux impuretés ioniques et organiques, ce qui nécessite une décontamination préalable des effluents liquides tritiés à traiter, et doit être périodiquement renouvelé. Ces données de dimensionnement rendent par conséquent cette technologie très onéreuse et difficile à mettre en œuvre aussi bien pour les usines de traitement actuelles que pour les réacteurs REP, ceci malgré sa maturité et le fait qu’elle n’induit pas, en particulier, de risque d’explosion (pas d’utilisation ou de production de dihydrogène sous forme gaz) contrairement à la plupart des autres procédés de séparation. Schéma de principe de la distillation d’eau tritiée C - condenseur, D – colonne de distillation, x F – fraction molaire d’eau tritiée dans le flux d’alimentation 5 1 5 Electrolyse directe La séparation du tritium par électrolyse directe de l’eau, qui aboutit à sa décomposition en dioxygène et dihydrogène gazeux (O 2 et HT/H 2 ), est basée sur la différence de tension d’électrolyse et de diffusion des ions dans l’électrolyte, de fortes densités de courant étant nécessaires : Electrolyse HTO→HT + ½ O 2 Electrolyse H 2 O→H 2 + ½ O 2 HT + H 2 O→HTO + H 2 Les formes moléculaires légères migrent plus rapidement dans l’électrolyte et sont préférentiellement réduites à la cathode, l’électrolyte s’enrichissant ainsi progressivement en tritium et le flux de dihydrogène produit s’appauvrissant en ce même radioisotope. Plusieurs étages avec recombinaison des phases gazeuses (HT/H 2 et O 2 ) sont nécessaires pour obtenir un enrichissement suffisant, l’électrolyte étant régénéré lorsque la teneur en tritium devient trop élevée. Les facteurs de séparation obtenus, fonction des écarts de masse atomique entre les espèces réduites à la cathode et migrantes dans l’électrolyte, dépendent du type d’électrolyseur utilisé (électrolyseur alcalin, à membrane…) et ne dépassent pas quelques unités, les capacités de traitement éprouvées variant de quelques L.h-1 à quelques centaines de L.h-1 [4][5] [38]. L’utilisation d’électrodes bipolaires a été également envisagée (elles évitent tout dégagement gazeux et permettent, en très peu d’étages, d’obtenir un facteur de concentration du tritium proche de 1000 [39]), cette technologie restant néanmoins complexe à mettre en œuvre.
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