207 Gestion des rejets de tritium du site AREVA NC de La Hague, impact et surveillance associés Dans cette configuration, le tritium contribue à hauteur de 0,1µSv/an à l’impact dosimétrique annuel de la Hague qui est de l’ordre de 10µSv à 20 µSv. Cette option constitue aujourd’hui l’optimum entre les critères de faisabilité technique, de sûreté, de protection des travailleurs et des riverains et de pertinence économique. AREVA NC étudie cependant d’autres possibilités qui pourraient consister à isoler le tritium afin d’en constituer un déchet. 2 Rejets de tritium de l’établissement AREVA NC de La Hague Pour mémoire, le tritium est un radionucléide naturel que l’on trouve notamment dans l’eau de mer à hauteur de 0,2 Bq/L. Sa période de décroissance radioactive est de 12,35 ans. C’est un émetteur bêta pur qui se désintègre en hélium. Il en disparaît chaque année naturellement 5,6 % pour former de l’hélium [4]. Le tritium existe sous différentes formes chimiques : eau tritiée (HTO), tritium gazeux (HT) et tritium lié à la matière organique (OBT2). 2 1 Le tritium dans le combustible irradié Lors de la fission, 1’uranium et le plutonium, formé ou préexistant, se scindent en 2 éléments de masses inégales. Cette fission s’accompagne de l’émission d’un ou plusieurs neutrons qui entretiennent la réaction en chaîne et d’un dégagement d’énergie correspondant à la perte de masse. Néanmoins, dans environ 1 cas sur 10 000, la fission conduit à la formation de trois noyaux, dont un noyau léger de tritium (fission ternaire directe) ou d’hélium-3, qui par capture neutronique suivie d’une désintégration conduit à la formation de tritium. D’après le code d’évaluation des quantités de radionucléides dans les combustibles irradiés (CESAR version 4) développé par le CEA, dans un combustible irradié à 33 000 MWj/t, la production de tritium se répartit comme suit : • fission ternaire directe (82,5%), • fission ternaire indirecte et activation d’éléments légers : formation via l’hélium-6 puis le lithium-6, (11,5%), • capture électronique suivie d’une désintégration conduisant à la formation de tritium : formation via l’hélium 3 (5%) et l’oxygène 16 (1%). Dans les conditions de température et de pression de fonctionnement des réacteurs nucléaires, le tritium produit dans les éléments de combustible est essentiellement sous forme de gaz dissous qui a tendance à diffuser vers la périphérie de l’oxyde du combustible i.e. du crayon combustible et à s’accumuler dans le jeu entre l’oxyde et la gaine. Il diffuse alors vers la gaine où il se retrouve piégé sous forme de gaz dissous jusqu’à saturation du zirconium et formation d’hydrures métalliques. Ce phénomène est limité par la faible diffusivité du tritium dans la gaine et la formation de couches d’oxyde de zirconium (zircone) sur les parois interne et externe de la gaine qui limitent le relâchement de tritium dans le circuit primaire. La répartition du tritium entre le combustible et la gaine dépend notamment du taux de combustion, de la vitesse de formation de la couche d’oxyde interne, du type de combustible, du réacteur. Il s’agit d’un phénomènecomplexequiaétéévaluéàtraversdiversesactions.Initialement, l’analyse de coques en 1986 (tronçons de gaines d’assemblage combustible découpés lors du traitement du combustible usé) issues d’éléments combustibles irradiés à moins de 33 000 MWJ/t avait conduit à une valeur comprise entre 60 et 70%du tritiumproduit présent dans ces coques. Cette valeur a été prise en compte lors de la conception de l’usine UP3. L’évolution des rejets annuels de tritium dans les effluents liquides de l’établissement AREVA NC de La Hague entre 1995 et 2007 montre une tendance inverse : la comparaison des rejets aux valeurs calculées à l’aide de CESAR version 4 font état d’une fraction dans l’oxyde supérieure à 60% et pouvant atteindre plus de 80%. 2 2 Comportement du tritium lors du traitement du combustible usé : stratégie de gestion des rejets de tritium Après cisaillage et dissolution du combustible, le tritium contenu dans le gainage reste piégé dans les coques destinées à être compactées et conditionnées, après lavage, pour constituer un déchet solide. La fraction du tritium contenue dans l’oxyde du combustible (non piégé dans les gaines du combustible) est quant à lui libéré lors de l’opération de dissolution. Le tritium est ensuite rejeté en mer principalement dans les eaux dites « tritiées » (environ 99,5 %) épurées des autres éléments radioactifs que le tritium. Une infime partie de ce tritium, compte tenu des propriétés de diffusion de cet élément, est rejeté sous forme gazeuse à partir de la ventilation du procédé de traitement (environ 0,5 %). Les installations de traitement AREVA NC de La Hague ont été conçues de façon à confiner le tritiumdans une zone restreinte de l’usine appelée zone tritiée et de le canaliser pour son rejet en mer. Les objectifs suivis étaient : • d’une part, de simplifier la manipulation d’acide nitrique recyclé dans la zone non tritiée3 et de limiter le risque de contamination des travailleurs à la zone tritiée, • d’autre part, de réduire au maximum les rejets de tritium dans les effluents gazeux et de favoriser les rejets de tritium dans les effluents liquides afin de bénéficier de l’importante réduction de l’impact permise par la dilution dans le milieu marin (gain dosimétrique de l’ordre de 5300 pour la population de référence des agriculteurs de Digulleville, et de 440 pour la population de référence des pêcheurs de Goury). Cette stratégie de gestion du tritium est présentée dans le plan national soumis par la France à la Convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique Nord-est dans le cadre du Programme détaillé de mise en œuvre de la Stratégie OSPAR visant les substances radioactives qui précise : « Le tritium est un radionucléide pratiquement impossible à piéger. C’est un émetteur bêta de faible énergie et de très faible radiotoxicité. Il est donc estimé que le tritium doit être prioritairement rejeté dans les effluents liquides ». A l’issue des travaux de l’ICG (Intersessional Correspondence Group) Brême, le Comité de Substances Radioactives a établi un consensus sur les points suivants notamment : d’une part, il n’existe actuellement pas de « faisabilité technique » pour une réduction à l’échelle industrielle dans les effluents liquides provenant des centrales nucléaires et des usines de traitement et d’autre part qu’il était nécessaire de conduire un examen périodique de l’élaboration des techniques de réduction des rejets [5]. 2 3 Evolution des rejets de tritium En2008, 99,5%du rejet de tritiumest sous forme liquide (8,19.103 TBq) et 0,5% sous forme gazeuse (46,4 TBq). Les limites réglementaires fixées par l’arrêté d’autorisation de prélèvements d’eau et de rejets pour le site nucléaire de La Hague sont rappelées dans le tableau le tableau 1. 2 OBT = Organically Bounded Tritium. Tritium intégré de manière covalente dans les molécules organiques. 3 Lors des opérations de dissolution dans l’acide nitrique et d’extraction en phase solvant, le tritium contenu dans le combustible reste principalement dans la phase liquide aqueuse contenant les produits de fission (sous la forme HTO, TNO 3 ). L’essentiel du tritium est confiné dans une seule partie de l’usine correspondant à la tête d’usine et aux unités de concentration des produits de fission. Cette quantité est réduite au maximum en lavant le solvant avec une solution nitrique diluée préparée à partir d’eau non tritiée. Ainsi, la majorité du tritium est confinée dans une seule partie de l’usine correspondant à la tête d’usine et aux unités de concentration des produits de fission. Lors de cette dernière opération, le tritium se répartit comme l’eau et est retrouvé principalement dans les distillats d’évaporation (eaux tritiées).
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