115 Rejets de tritium des CNPE d’EDF Le long des côtes françaises de la Manche, les mesures de tritium dans l’eau libre des algues mettent en évidence que les rejets des CNPE en Manche (Flamanville, Paluel, Penly, Gravelines) contribuent certes au niveau observé, mais représentent une faible part des rejets tritiés en Manche. Ces activités varient de l’ordre de 15 Bq.L-1 à Flamanville à 3 Bq.L-1 à Gravelines (influence de l’éloignement de La Hague). Les activités dans la matière organique des organismes marins des eaux normandes sont du même ordre de grandeur que celles dans l’eau, en cohérence avec des rejets industriels sous forme d’eau tritiée (HTO). Les activités en tritium dans les eaux marines de la zone dite OSPAR (zone maritime correspondant approximativement aux eaux côtières européennes de l’Atlantique du nord et du nord-est, à l’exception de la mer baltique), atteignent des niveaux de l’ordre du becquerel par litre dans les zones éloignées des côtes, c’est-à-dire similaires aux activités d’origine naturelle. 6 Interprétation des mesures des différentes formes de tritium dans l’environnement autour des CNPE Dans l’environnement, le tritium des CNPE est majoritairement rejeté sous forme d’eau tritiée (HTO) [1]. Sous cette forme, il peut à la suite de réactions métaboliques complexes comme la photosynthèse être incorporé à des composés organiques. Ainsi l’activité spécifique de la matière organique, exprimée en nombre d’atomes de tritium par rapport au nombre d’atomes d’hydrogène, ou en becquerel de tritium par gramme d’hydrogène, va tendre vers celle de l’eau. Ce tritium organiquement lié (OBT pour Organically Bounded Tritium) peut ensuite être transféré à d’autres compartiments de l’écosystème via la chaîne alimentaire. La mesure du tritium libre (HTO) dans l’eau extraite des végétaux fournit ainsi une valeur ponctuelle, image de la concentration dans l’eau ou dans l’air ambiant au moment du prélèvement. La mesure du tritium lié à la matière organique (OBT) des végétaux incorporés lors de la photosynthèse et par les animaux permet, quant à elle, d’avoir une information rétrospective sur l’activité moyenne en tritiumde l’eau ou de l’air sur toute la période de formation de la matière organique. Ainsi, les observations effectuées sur le terrain confirment sur les mesures de tritium HTO et OBT que le tritium ne se « concentre » pas isotopiquement, comme le montrent les mesures réalisées sur les végétaux et les animaux des écosystèmes aquatiques en Manche depuis une dizaine d’année [2]. Enfin les expérimentations sur le tritium libre et le tritium organique réalisées sur les végétaux terrestres et aquatiques et sur les espèces animales montrent que le tritium ne se concentre pas non plus dans la chaîne alimentaire [3]. 7 Modélisation et évaluation de l’exposition due au tritium La dose attribuable au tritium chez l’homme résulte de l’incorporation d’eau tritiée et de molécules organiques tritiées. En comparaison avec l’eau tritiée, l’exposition au tritium gaz est négligeable. L’exposition externe est nulle en raison des caractéristiques physiques de ce radionucléide (rayonnement de faible énergie). En raison de la taille plus grosse de l’atome de tritium par rapport à l’atome d’hydrogène, l’incorporation du tritium à la matière organique est légèrement inférieure à celle de l’hydrogène. Néanmoins, pour rester majorantes, les différentes modélisations retenues pour calculer l’impact des rejets de tritium des CNPE ne tiennent pas compte de cette différence et considèrent que les atomes de tritium ont exactement le même comportement que les atomes d’hydrogène lors de la photosynthèse. Sur ces bases, les calculs d’impact dosimétrique sont réalisés en tenant compte des activités rejetées, sous forme liquide et gazeuse, et de différentsparamètresliésàl’environnementdechaquesite(météorologie, habitudes alimentaires, dispersion/dilution dans le milieu récepteur) et des différentes voies d’exposition pour l’homme comme l’ingestion d’aliments et d’eau ou l’exposition externe. Ainsi pour les CNPE de bord de mer, le modèle prend en compte la consommation des produits marins pêchés dans un rayon de 500 mètres autour du CNPE et inclut des expositions externes dues à 100 heures par an passées sur la plage et 20 heures par an de baignade avec ingestion d’eau de mer. Le modèle considère d’une part le tritium sous forme d’eau tritiée et d’autre part le tritium incorporé à la matière organique. Ces évaluations montrent que les rejets de tritium des CNPE d’EDF ne contribuent que de manière marginale (« trivial » au sens de la CIPR4) à l’exposition du public. En effet, la contribution du tritium varie entre une dizaine de nano-sievert et quelques centaines de nano-sievert par an [4, 5], suivant les sites et les années, mais reste toujours inférieure à 1 microSv par an (1000 nano-sievert). Cette exposition est bien sûr à comparer avec la limite réglementaire de 1000 microSv par an pour le public et à l’exposition moyenne attribuable à la radioactivité naturelle en France de 2400 microSv par an. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] Bernard Le Guen (2008). Impact du tritium autour des centrales nucléaire d’EDF. Revue Radioprotection 2008, volume 43. EDP Science. [2] M. Masson, B. Fiévet, P. Bailly-Du-Bois, L. Tenailleau, A. Olivier (2009). Le Tritium en Manche. Journées SFRP sur le tritium, 22 et 23 septembre 2009. [3] Y. Belot, M. Roy, H Métivier (1996). Le tritium de l’environnement à l’homme. Les éditions de physiques, Les Ulis. [4] Bilan radioécologique de l’environnement terrestre et aquatique du CNPE de Dampierre-en-Burly (1977-2007), ELIER0800887A. [5] B. Le Guen, V.Chrétien, P.Y. Hémidy, M.J. Sagot (2009), Rejets de tritium et impact autour des Centres Nucléaires de Production Électricité d’EDF. Journées SFRP sur le tritium, 22 et 23 septembre 2009. 4 Commission internationale de protection radiologique.
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